Phénoménologie en thérapie
l’hypnose est (presque) partout — et c’est une bonne nouvelle
Attention, corps, temps, mémoire, dissociation : une cartographie des expériences vécues en thérapie (hypnotique ou non), avec repères de sécurité et usages cliniques stratégiques.
1) Phénoménologie : on parle de quoi ?
La phénoménologie, c’est la science du “comment ça se vit de l’intérieur”. Pas l’histoire. Pas l’explication. L’expérience. Et en thérapie, c’est souvent là que se cache le levier : on ne change pas une “idée”, on change un vécu.
Repère utile : l’Inserm rappelle que les états de conscience modifiés (absence, rêverie intense, hallucination…) sont très répandus ; certains sont pathologiques, d’autres peuvent avoir des effets positifs voire thérapeutiques.
2) Le spectre des expériences thérapeutiques (hypnose ou non)
Quand l’attention se resserre, le “reste” devient secondaire. (C’est la base des EMC du quotidien : film, conduite, concentration.)
Accélération/ralentissement : “ça a duré 2 minutes… ou 2 heures”. Très fréquent en travail imagé.
Lourdeur, légèreté, chaleur, picotements, stabilité : le corps devient “preuve” que quelque chose se réorganise.
Changements de valence (“c’est moins menaçant”), de fonction (“ça me protège”), ou de localisation (“c’est descendu”).
Souvenirs, futurs, métaphores vécues : parfois net, parfois conceptuel. Canal très variable selon les personnes (VVIQ, aphantasie…).
Observer vs vivre ; proximité vs recul. Utile en thérapie… tant que c’est choisi et régulable.
Clinique : dès qu’on sait où se situe l’expérience (attention ? corps ? temps ? image ? identité ?), on sait mieux quoi faire.
3) “Hypnose partout” : ce n’est pas une formule, c’est un continuum
La Lettre de l’Association des Neurosciences (CNRS/Univ.) décrit l’hypnose comme un état modifié de conscience pouvant se produire naturellement, caractérisé notamment par absorption, dissociation et tolérance aux suggestions, avec des exemples quotidiens (film, conduite, fascination).
Conséquence simple : en thérapie, on peut travailler “hypnotiquement” sans induction formelle, dès lors qu’on installe une expérience d’attention et de vécu.
4) À quoi ça sert, stratégiquement ?
A) Installer un état de travail (sans forcing)
- Rendre l’attention simple : une consigne courte, répétable, observable.
- Faire émerger un marqueur (corps/temps/émotion) : “qu’est-ce qui change, même de 5% ?”.
- Valider : “c’est mieux ?”, “c’est différent comment ?”.
B) Changer une trace, pas un récit
Beaucoup de thérapies efficaces (pas seulement l’hypnose) s’appuient sur des mécanismes communs : alliance, cadre, émotions, apprentissages, et réorganisation de l’expérience. La synthèse Inserm (expertise collective 2004) rappelle que les psychothérapies sont des traitements fondés sur une relation singulière, et que leur évaluation mobilise des méthodes spécifiques.
C) Généraliser : le vrai “test” est dehors
Le phénomène n’est pas la victoire. La victoire, c’est la vie qui redevient fluide : moins d’évitement, plus de liberté, un cerveau qui arrête de tirer l’alarme pour rien.
5) Repères de sécurité : quand un phénomène devient un signal d’alerte
- Hallucination (définition clinique) : perception sans stimulus correspondant. Toujours contextualiser et orienter si nécessaire. (Définition : CHU Nantes)
- Dissociation péritraumatique : dépersonnalisation/déréalisation (Santé publique France). Si présent, priorité à la stabilisation et au présent, pas à l’intensification.
- Imagerie : éviter de “pousser” vers des souvenirs détaillés ; le cadre doit prévenir le risque de faux souvenirs (prudence standard en clinique).
Règle pratique : ce qui compte n’est pas “est-ce impressionnant ?”, mais est-ce régulable, écologique et au service d’un objectif.
6) Mini-grille phénoménologique (utilisable en 2 minutes)
- Attention : large ou focalisée ? stable ou zapping ?
- Corps : tonus, respiration, chaleur, localisation…
- Temps : vitesse subjective ?
- Émotion : intensité, valence, fonction, mouvement ?
- Images / pensées : images nettes, idées, métaphores, “rien” ?
- Distance à soi : proche/loin, observateur/acteur ?
- Contrôle : subi, choisi, co-construit ?
Vous voulez utiliser ces phénomènes de façon stratégique ?
Si vous cherchez une approche pragmatique (expérience → validation → propagation), vous pouvez prendre rendez-vous.
Références (accès en ligne)
- Inserm (25/09/2022). À méditer – C’est quoi un état de conscience modifié ? https://www.inserm.fr/c-est-quoi/a-mediter-cest-quoi-un-etat-de-conscience-modifie/
- Inserm (2015). Évaluation de l’efficacité de la pratique de l’hypnose (rapport thématique, PDF). https://www.inserm.fr/wp-content/uploads/2017-11/inserm-rapportthematique-evaluationefficacitehypnose-2015.pdf
- Association des Neurosciences (06/2024). Lettre 48 (bases neurophysiologiques, absorption/dissociation/suggestibilité, exemples d’EMC). https://www.neurosciences.asso.fr/wp-content/uploads/2024/06/LETTRE-48.pdf
- Santé publique France. Dissociation péritraumatique. https://www.santepubliquefrance.fr/les-maladies-et-traumatismes/sante-mentale/dissociation-peritraumatique
- Inserm (2004). Psychothérapies : trois approches évaluées (synthèse, PDF). https://ipubli.inserm.fr/bitstream/handle/10608/166/expcol_2004_psychotherapie_synthese.pdf
- CHU de Nantes (cours PDF). Délires et hallucinations (définition clinique).
